10 octobre 1978 article parut dans "le Progrès":

 

 

ARNAS: La comtesse Tatiana de Fleurieu a reçu la rosette d'officier de la légion d'honneur.

 

"Des pages héroïques ont été écrites par ceux qui, les mains nues, ont eu le courage d'affronter un ennemi impitoyable; pages d'ombre et de sang que l'on feuillette parfois, quand bien même: leurs auteurs, rescapés d'un long calvaire, eussent préférés ne pas ouvrir le livre du passé, en ce qui les concerne personnellement.

Mais ce rappel est aussi bien exaltant quand il permet de retrouver le véritable idéal de la résistance, celui de l'union sacré pour la liberté. Or, à Arnas dans le vaste parc du château de Longsard, propriété du comte Ernest de Fleurieu, c'était véritablement la résistance française qui honorait un de ses soldats, Madame la comtesse Tatiana de Fleurieu.

Tous ces anciens résistants avaient laissé de côté les idéologies, les religions, la politique. Ils n'étaient plus de droite ou de gauche, croyant ou athées, ils étaient les combattants de la liberté  comme ils le furent de 1940 à 1945. Et c'est sans doutes là, dans cette union fraternelle, ce que la résistance avait de plus sublime.

Madame de Fleurieu, déportée, résistante, lieutenant des forces françaises libres recevait la rosette d'officier de la légion d'honneur, à titre militaire, très simplement, en soldat.

Médaille de la résistance

Resistante et déportée

Dans la cour du château, trois drapeaux seulement comme le veut le protocole militaire, et derrière, les membres de la légion d'honneur pour la plupart anciens de la résistance et des FFL. Au commandement du colonel POIZAT, président des anciens résistant, la batterire-fanfare, interpréta les sonneries d'usage et, devant les drapeaux, l'amiral La Haye, président de l'association des français libres, épingla sur la poitrine de Madame de Fleurieu, la croix d'officier dans l'ordre de  la légion d'honneur, distinction rarissime, à titre militaire, pour une femme.

Pas de discours, pas d'effusion, les braves n'en ont nul besoin. La reconnaissance nationale s'est exprimée à travers le cérémonial militaire, simple, sobre, stricte. C'est en soldat que Madame de Fleurieu a été distinguée, car les services rendus l'ont été au seul bénéfice de la patrie, l'engagement volontaire qu'elle a pris ayant contribué à cette victoire finale qui a assuré la pérennité de notre pays.

De son action, Madame de Fleurieu n'en parle jamais, et c'est par une indiscrétion que nous avons apprit ces différentes activités au cours de la guerre 39-45. Qu'elle nous pardonne de lever le voile de souvenirs et de mettre à mal sa modestie, mais il est utile que l'exemple de telles femmes soit livrées à la jeunesse française ne serait-ce que pour qu'elle comprenne toute la valeur de ces mots trop souvent galvaudés : justice et liberté.

La Comtesse Hernest de Fleurieu, née Tatiana des Moustiers-Hérinville avait déjà mit sa capacité de dévouement au service de son pays lors de la première guerre mondiale comme ambulancière, secouriste, soignante. Lorsque vint le drame de 1940, madame de Fleurieu, alors que tout s'écroulait, voulut croire quand même que la France était toujours un grand pays et qu'elle pourrait se relever.

Dès 1942, elle est agent de renseignements au sein du réseau Castille et axe son action sur les forces d'occupation du sud-ouest de la France où elle habite. A compter du 1er janvier 1943, elle appartient au réseau Busk Master comme agent-action. Elle est chargée de l'hébergement et du transfert sur les FFL, des patriotes et prisonniers de guerre évadés. Malgré le danger, madame de Fleurieu héberge et oriente, avec succès, de multiples missions de convoyage, mais, arrêtée, sur dénonciation par la Gestapo, elle est internée le 11 août 1943, puis déportée en Allemagne le 26 janvier 1944.

Elle sera le libérée le 19 mai 1945, marquée à jamais dans sa chair, puisqu'elle est invalide à 80 %. Madame la Comtesse de Fleurieu est titulaire de trois citations de la croix de guerre 39-45, de la médaille de la Résistance.

Une belle figure de femme Française

 

A l'issue de la cérémonie, madame de Fleurieu reçut les témoignages de sympathie de la nombreuse assistance, parmi laquelle les élus de la région, les représentants de divers organismes, et des associations d'anciens combattants. Le Colonel POIZAT sut évoquer la Résistance avec beaucoup de foi, y associant souvent l'action de madame de Fleurieu, par la magie du souvenir. Souvenir des camarades de combat qui ayant tout donné n'ont pu participer à la victoire, souvenir des compagnes de misère dans les camps de concentration qui ne reçurent même pas une croix de bois. C'est là le martyrologue du seul combat qui mérite d'être mené, celui de la liberté et de la dignité des hommes.

Le Colonel POIZAT aborde aussi le thème de la patrie, aboutissement des traditions d'Histoire : "Cette patrie, dit-il, souvent au bord du gouffre, car nombre de ses enfants ne la retrouvent que dans le désespoir, cette patrie, vous l'avez bien servie, en soldat, avec humilité, dans le rang, au coude à coude, avec des hommes et des femmes de France, de toute religion, de toute philosophie".

L'amiral La Haye, quant à lui, voulut surtout lancer un appel aux jeunes en rappelant que la France libre, forte de 52 000 combattants, était faite principale de jeunes de 18 à 20 ans. Quant à la Résistance, elle était faite de jeunes aussi, qui avaient une force d'armes extraordinaire, une volonté physique et morale à toute épreuve.

Dans le cuvage où avait lieu la réception, ils étaient tous là les rescapés de la fureur nazie, vieillie certes, mais gardant toujours dans leur chair, souvent meurtrie la même générosité qu'ils avaient, il y a trente-cinq années.

Ils étaient les Résistants, et, dans leurs premiers pas, les sages les considéraient comme des insensés, mais les insensés, eurent raison contre les sages. Ils étaient les Résistants, et ils nous ont apportés la liberté.

Tatiana CLARET de FLEURIEU est déportée en Allemagne sous la matricule 27653 au camp de RAVENSBRÜCK puis "affectée" à RECHLIN. Rechlin est situé dans le centre du Mecklembourg où on travaille pour un terrain d'aviation. RECHLIN est également une prison de 1943 à 1945, les détenus travaillent à Retzow près de Rechlin.

 

Officier de la légion d'honneur  le 10 octobre 1976 pour fait de résistance

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SOMMAIREBIOGRAPHIESTATIANA CLARET de FLEURIEU

Référence; http://www.bddm.org/liv/details.php?id=I.175.#DEFLEURIEU