A Gauche: La Pérouse, a droite: Fleurieu.

 

 

Fleurieu et La Pérouse

 

 

Après avoir lu l'édition du troisième voyage de Cook qui parut en 1784, Louis XVI avait fait le constat qu'il restait encore beaucoup de zones d'ombres dans la cartographie du Pacifique et qu'il pouvait y avoir d'autres terres à découvrir et d'autres routes maritimes à explorer pour développer le commerce avec des pays lointains comme la Chine ou le Japon.  Il confia son projet à son ministre de la marine, le maréchal de Castries, ce dernier lui indiqua Fleurieu comme l'homme le plus compétent pour le réaliser. Charles-Pierre CLARET de FLEURIEU ancien capitaine de vaisseau, était depuis 1776 directeur des ports et arsenaux, poste clé où il eut la charge de préparer les plans des opérations de la guerre d'Amérique. Fleurieu fut le principal promoteur d'un voyage autour du monde du type de James Cook qui avait apporté tant de prestige à Albion.

 

Les préparatifs de ce voyage durèrent un an environ de 1784 à l'été 1785. Dès le début, Fleurieu avait présenti Jean-Fraçois de Galaup, comte de La Pérouse pour diriger l'expédition en raison de sa navigation dans les eaux glacées de la baie d'Hudson en 1782.

Afin de ne pas éveiller les adversaires anglais, les deux hommes se rencontraient dans le plus grand secret pour élaborer le projet. Fleurieu tenait Louis XVI régulièrement informé et le rôle du ministre de la marine le maréchal de Castries se bornait à superviser et à donner les autorisations nécessaires à la bonne marche des préparatifs.

 

La Pérouse, Louis XVI et Charles-Pierre préparant l'expédition.

 

Le 9 mars 1785, Louis XVI confia officiellement à La Pérouse le commandement en chef de l'expédition et Paul Antoine Fleuriot de Langle fut nommé commandant en second, début avril.

Le 15 mars, on choisit deux navires, Le Portefaix et l'Autruche comme vaisseaux de l'expédition. Ces deux bâtiments, des flûtes de 450 tonneaux furent armées à Brest et qualifiées de Frégates sous les noms respectifs de la Boussole et l'Astrolabe.

 

Le plan de navigation devait combler les lacunes laissées par Cook lors de ses trois voyages. On opta pour un voyage de quatre ans en faisant des escales tous les quatre mois pour éviter les attaques de Scorbut des très longs séjours en mer.

 

Ce projet d'expédition répondait à trois principaux objectifs:

 

Tout d'abord faire progresser les connaissances scientifiques dans tous les domaines (géographie, astronomie, météorologie, physique, chimie, botanique, zoologie, minéralogie, médecine)... 17 savants embarquèrent dans cette expédition.

Ensuite  développer le commerce très lucratif des fourrures entre la côte Nord-Ouest de l'Amérique, du détroit de Béring au port de Nootka et les côtes chinoises et japonaises.

 

Enfin restaurer ou plutôt améliorer le rayonnement de la France face à la "perfide Albion".

 

Fleurieu rédigea dès le 15 février 1785 les instructions générales du projet sous le titre projet de découvertes. Louis XVI les annota de sa main, fort instruit de géographie et de sciences. la version définitive du projet fut achevé le 26 juin 1785. L'ensemble des instructions données à La Pérouse a été réuni dans un manuscrit de 312 pages établi en trois exemplaires et intitulé Projet, Instructions, Mémoires et autres pièces, relatifs au Voyage de découvertes ordonné par le Roi sous la conduite de M. le Capitaine des vaisseaux de Sa Majesté, commandant ses frégates la Boussole et l'Astrolabe expédiées du port de Brest en 1785.

 

 

 

Portrait de La Pérouse Ph coll archives Larbor

 

 

Un exemplaire fut remis à Louis XVI, un autre à La Pérouse et le dernier à Fleurieu. Faisant suite à ses instructions générales de février, Fleurieu rédigea la première des cinq parties qui composaient le mémoire ayant pour titre "Mémoire du Roi pour servir d'instruction au Sieur de La Pérouse, Capitaine de ses vaisseaux de Sa Majesté, La Boussole et l'Astrolabe", ainsi que la note préliminaire à ce mémoire. Dans cette première partie intitulée "Plan du voyage ou projet de navigation" Fleurieu détaille l'itinéraire que devra suivre La Pérouse en tenant compte des remarques que Louis XVI avait portées sur son premier projet. Les quatre autres parties ont été rédigées par le Roi. La seconde partie concerne la politique et le commerce, la troisième est relative aux études scientifiques, la quatrième à la conduite à tenir avec les indigènes des pays visités et la cinquième traite des problèmes de santé, susceptibles de se poser aux membres de l'équipage au cours du voyage. Les annotations de Louis XVI au sujet des indigènes ont été célèbres pour leur qualité humaine voir humanistes. On sait comment le Roi fut justement récompensé de cette humanité dès 1789.

 

Après le départ du Comte de La Pérouse le 1er août 1785, Fleurieu fut destinataire des lettres de l'expédition. Il fut mis au courant des différentes péripéties du voyage par courrier jusqu'au débarquement de Jean-Baptiste Barthélemy de Lesseps en Sibérie, porteur de la dernière lettre de La Pérouse. Le naufrage des vaisseaux n'ayant plus de doute pour Fleurieu, il prépara une expédition de secours ave c son amis d'Entrecasteaux. Les deux vaisseaux se sont en effet empalés sur une barrière de corail dans l'île inhospitalière de Vanikoro en juin 1788.

 

La Pérouse appela un cap situé entre la nouvelle Hollande et la nouvelle Guinée "Le cap Fleurieu" Latitude Nord 51d  45', longitude occidentale 131  15. Est également connu le mont Fleurieu situé par 51°-30'. Plus tard, le navigateur Nicolas Baudin baptisa une péninsule "la Péninsule Fleurieu" au Sud d'Adélaïde en Australie.

 

Fleurieu était donc le principal organisateur de l'expédition de La Pérouse avec le Roi bien entendu.

Non content d'avoir rédigé les instructions, il dressa également toutes les cartes nécessaires à l'expédition. Cependant le rôle de Fleurieu, à la fois déterminant et discret, est encore trop injustement méconnu dans le grand public.




 

 

 

 

                             

Correspondance entre La Pérouse et Charles-Pierre de Fleurieu

 

 

 

Ces lettres ont un intérêt historique très important, car elles sont les seules nouvelles émises par l'infortuné navigateur qui nous sont parvenues. Ces lettres intimes étaient ajoutées avec la correspondance officielle.

 

1ère Lettre:

 

De Ténérif, le 28 août 1785

 

"La santé de M Monge ne lui permet plus de continuer la campagne. C'est un grand malheur pour nous, car c'est un homme plein de talent et d'amabilité. J'aurais mieux aimé que cette maladie eût atteint ce cher de....., qui est une mauvaise tête..... Tous nos jeunes gens travaillent; ils seront de parfaits astronomes au retour. Le jeune Darbaud est un prodige. Au surplus, de langle est assez astronome pour supléer M Monge, surtout en pouvant, de temps en temps, se concerter aec Dagelet, qui est infatigable, d'une bonne volonté que rien ne lasse. Adieu mon cher, dites milles choses à Latouche, je lui écrirais par M Monge.

 

La Pérouse"

La Pérouse..

 

 

La seconde Lettre date de Sainte-Catherine le 16 Novembre 1785


"Vous trouverez ci-joint, mon cher Fleurieu, la minute assez informe de ma lettre au ministre. Vous y lirez tous les détails que j'envoie pour vous seul. J'ai bien du regret d'avoir si peu de temps à moi. Nous nous portons tous au mieux. N'oubliez pas, mon cher ami, de nous écrire au Kamtchatka, à Manille, à la chine et à l'Ile de France. Vous ne pouvez jamais vous imaginer combien vos lettre nous font plaisir et nous sont nécessaires. Joignez-y, je vous prie, toutes les gazettes possibles. Adieu ; Je vous aime de tout mon coeur et vous suis attaché à vie.

 

La Pérouse"

 

"Tous nos savants se conduisent au mieux, et mes politesses, en compensant le refus que j'avais, fait à Ténériffe, de payer leur voyage au Pic, ont tout ramené. j'en suis très content. Aujourd'hui il y a quelques rivalités entre eux, chacun n'estimant que sa partie, mais je m'y attendais. M Dagelet est un homme charmant; je crains seulement qu'il ne soitun peu paresseux, et ne tienne pas à son cahier dans l'ordre que vous désirez. D'ailleurs, on ne peut être ni plus instruit, ni plus aimable"

La Pérouse"

 

 

 

 

La Boussole de L'astrolabe.


La troisième, M. de la Pérouse l'écrivit le 14 mars 1786, une lettre qui ne sera pas lue sans émotion, car elle semble avoir été un dernier adieu à son ami. Cette impression apparaît surtout à la fin, par la marque d'affection de La Pérouse à Fleurieu.
 


«Je ne vous fais, mon cher Fleurieu, aucun détail sur ma campagne, parce que vous lirez ceux que j'adresse par duplicata au ministère. J'imagine que vous approuvez que je commence par la côte du nord-ouest de l'Amérique, ne doutant pas que l'expédition des Anglais ne soit pour cette partie, et peut-être pour la côte de la Tartane au sud du Kamtchatka. Ainsi, il est bon de les prévenir et d'arriver avant eux. J'emploierai deux ans à parcourir l'hémisphère nord, et deux ans dans l'hémisphère sud. J'ai fait en sorte de réunir à mon plan tout ce qui est contenu dans mes instructions. Si je ne puis aller à l'île de Pitkaine de Carteret, je prendrai certainement connaissance d'une terre aperçue par lui; j'en déterminerai la position, et nous en conclurons la position des différentes terres reconnues par ce navigateur.

Mon bâtiment marche très-mal et ne gouverne point, parce que l'arrimage a été manqué à Brest et que nous ne pouvons le ramener sur l'arrière ; d'ailleurs il porte la voile supérieurement et ne fait point d'eau. Ainsi tout est au mieux. 11 n'y a pas un seul malade sur les deux bâtiments, ce qui est peut-être sans exemple, après une navigation de six mois. J'aurais bien voulu ne pas relâcher à la Conception, afin qu'on ne pu pas objecter que nous avons eu plus de facilité à réussir que les navigateurs anglais ; mais je n'avais point assez de biscuit ; les vers s'en sont déjà emparés et l'ont presque à moitié détérioré. J'avais laissé cent quarts de farine à Brest , faute d'espace pour les contenir, et en vérité rien ou presque rien ne peut suppléer le pain pour les matelots français, excepté le riz.

 

Si j'avais commencé ma campagne par l'hémisphère sud, j'aurais trouvé du riz à l'île du Prince et des racines aux îles de la Société et des Amis; mais, commençant par le nord, il me faut tout ce qui m'est nécessaire pendant dix-huit mois ou deux ans, afin de ne pas mutiler ma campagne faute de vivres, et de n'être pas obligé d'aller chercher très loin un port où je puisse me ravitailler.
Je vous renvoie encore une fois, mon cher Fleurieu, à mes lettres du ministère. Je vous embrasse et Vous aime de tout mon cœur.

LA PEROUSE. »

«Tous mes savants sont aimables et de bonne société, mais il n'y a que Dagelet et Lamartinière d'utiles. Le premier a formé tous nos jeunes gens de manière que nous pourrions nous passer de lui, mais nous le regretterions infiniment, car il est chéri de tout le monde. "Nous naviguons avec une telle précision qu'il y a jamais eu trois lieues de différence à la vue des terres sur lesquelles on avait fait des observations. Je regarde le problème des longitudes comme entièrement résolu; il ne faut pas plus que perfectionner les cartes, ce qui est une suite nécessaire des nouvelles méthodes. Adieu, encor une fois; je vous embrasse et vous aime de tout mon coeur.

 

La PEROUSE »

 

 

 

Il en recevra d'autres, la dernière fut envoyée le 7 février 1787 (voir plus loin), Cette lettre sera bel et bien un dernier Adieu.

 

Pour voir sa dernière lettre,

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Reportages sur La Pérouse:

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

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